mercredi 30 septembre 2015

Mondiaux de cross-triathlon en Sardaigne : à la porte du top 10 en élite

La saison de triathlon s'est achevée le week-end dernier en Sardaigne, dans un cadre qui est sans doute le plus beau de tout ceux que j'ai connus jusqu'alors : eaux cristallines, chemins dans un massif évoquant l'Esterel, les odeurs d'eucalyptus en plus et course à pied en bord de mer.

L’événement était très bien organisé, nous étions installé dans le camping qui accueillait l’épreuve et tout était donc sur place. Le travail terminé et le trajet effectué, nous pouvions souffler deux jours avant la course tout en faisant nos repérages.

Le site de la course dans le secteur d'Orosei (Cala Ginepro)


La récupération après Gerardmer, les derniers ajustements

Une certain fatigue s'est installée progressivement cette saison et j'étais donc plutôt sceptique sur mes dispositions pour cette course. Non pas une fatigue physique, mais plutôt psychologique, consécutive à toutes ces années passées à concilier travail et sport de compétition. Je pense que cela exige plus de sacrifice que pour quelqu'un qui peut faire ce sport à 100% (rare), ou au moins, ceux qui connaissent de longues périodes de vacances, comme les étudiants. Bien sûr, nous acceptons ces sacrifices car le sport enrichit nos vies, mais parfois, on aimerait pouvoir laisser le temps passer pour récupérer et profiter davantage d'autres plaisirs de la vie. Ce sentiment m'aura accompagné toute cette saison, en dépit de mes bons résultats. Je sentais qu'il était temps de faire une pause cette année, mais j'avais besoin de me reconstruire après une année 2014 un peu plus difficile, et le projet de la Cape Epic m'a effectivement permis de rebondir de la meilleure façon qu'il soit.

Ce mois de Septembre aura été peu reposant, avec un travail assez fatigant nerveusement (et la fatigue post-triathlon XL de Gerardmer n'aura pas aidé à bien récupérer sur ce plan là). J'ai eu plus de mal à me concentrer sur les échéances sportives et le soutien de "coach André" (Quet) en cette fin de saison m'aura permis de limiter les dégâts.
Nous avons plutôt travaillé sur ma récupération sur le plan nerveux les dernières semaines. D'habitude, nous nous basons sur les tests de variabilité cardiaque, effectués le matin au réveil (8' allongé / 7' debout). Après analyse des courbes HRV via le logiciel Kubios, l'interprétation permet de savoir quel type de fatigue nerveuse prédomine : celle du système parasympathique ou celle du système sympathique, qui sont antagonistes. Pour résumer, si le "para" prédomine, le corps est davantage prêt à "réparer" (calmer l'activation nerveuse de tous nos organes/muscles), si au contraire le sympathique domine, le corps est plutôt prêt à activer tout le système, ce qui peut conduire à une certaine fatigue, ou au surentraînement.

N'ayant plus de quoi prendre mes courbes HRV les derniers temps, nous nous sommes plutôt basés sur mes courbes cardiaques à l'entraînement et au repos, et mes sensations au quotidien : nervosité, humeur, sommeil, appétit et motivation en terme d'entraînement (envie de faire du long/du court, motivation pour les séries courtes/longues etc...).
J'étais assez tendue en ce mois de Septembre, et fatiguée lorsque la tension disparaissait. Parfois moins l'envie d'aller m'entraîner du coup, mais je sentais qu'après une bonne séance, mon système nerveux était apaisé et les batteries rechargées. Il était donc important de réactiver le système parasympathique dans mon cas, ce qui s'est fait à l'aide d'entraînements plus courts et des séries plus souvent courtes. Finalement assez peu de VTT, tout juste assez pour retrouver un bon pédalage (pour la motricité en particulier) et un bon pilotage.
En natation, nous avons fait un travail plutôt technique, avec intégration d'un travail de vitesse pour bien imprimer les acquis. Mes sensations étaient bonnes et la motivation aussi, j'ai senti de réel progrès en bassin.

Petit à petit, j'ai retrouvé beaucoup d'énergie à l'entraînement, malgré toujours une certaine tension à côté. A vélo, les jambes tournaient vite et je pouvais mettre de la force, en course à pied je pouvais aller vite. En natation, je pouvais mettre de la force au niveau de mes bras et enchaîner les séries courtes sans problème. D'excellentes sensations donc, plutôt rares dans une saison, qui m'ont surprise mais redonné confiance pour la course.

La course parmi les élites

Je me réjouis toujours de faire une course de haut-niveau, car je sais qu'il y a plus de concurrence et qu'il faut du coup donner encore davantage le meilleur de soi-même.
Beaucoup de nations étaient présentes à ce départ de la course élite, où nous étions 24 filles : nations européennes, mais aussi des athlètes du Mexique, des Bermudes, de Nouvelle-Zélande, Chili, Afrique du Sud, Brésil...
La plupart des autres filles concourraient pour la course "amateur", en catégorie d'âge. Elles étaient bien plus nombreuses que nous au départ ! Je choisis pour ma part de m'aligner sur la course Elite car je préfère justement me frotter aux meilleures, même si je n'ai souvent pas la même expérience ou les mêmes conditions pour m'entraîner et pouvoir prétendre à un résultat de haut-niveau. En même temps, la course serait triste avec 10 filles au départ !

Nous étions la première course de ce week-end de triathlon, ce qui est bien pour pouvoir profiter ensuite des autres courses et encourager les autres, mais qui pour moi était un peu moins bien car j'aurais aimé pouvoir monter en pression avant ma course en regardant les courses des autres. Cela m'aurait forcé à me concentrer davantage sur les aspects techniques importants sur une course de ce niveau, comme les transitions, que j'ai trop négligées.

Réveil à 6h en ce samedi matin, petit déjeuner et dernier préparatif, pour une course à 9h. On prépare les affaires sereinement, l'ambiance est un peu plus détendue que le jour précédent où on sentait pas mal de tensions parmi les concurrentes habituelles.

Avec Eléa, la représentante française chez les U23, avant le départ - Photo OrgaNICOach


Appel sur la plage après le départ des hommes pour une mise en ligne côte-à-côte.

Le départ dame élite - Photo OrgaNICOach

Le départ donné, j'essaie de m'accrocher à un groupe en me calant dans la vague de la concurrente à ma droite, je perds le contact au bout de 300m et ne fais pas forcément l'effort à ce moment là pour raccrocher. Là, je me rappelle que l'on n'est pas nombreuses et qu'il va me falloir sans doute nager seule en me retrouvant à l'arrière...cela me rappelle le mauvais souvenir des championnats d'Europe, mais cette fois, j'ai le sentiment d'être bien dans l'eau, l'orientation n'est pas un problème car on voit le fond même au large et les bouées ne sont pas très distantes.
Je fais donc ma petite natation, de temps en temps je sens qu'on me touche les pieds ou j'aperçois quelqu'un sur le côté : je ne suis pas seule, mais pour une fois, c'est de moi que l'on profite.
Sortie à l'australienne, comme d'habitude, je sais au fond de moi ce que je dois faire et où aller, mais je me laisse perturber par l'arrivée d'autres filles sur la plage, qui sont en fait de la course Junior qui part après. Ce qui me fait perdre bêtement quelques secondes.
Sortie de l'eau, plutôt contente malgré tout de ma natation, David m'annonce que j'étais dans le dernier groupe avec Sandra Kobelmüller (la Speedy Gonzales en course à pied) et qu'il y a un groupe à 2 minutes. Waouh...dur, pour quelqu'un qui se sentait bien dans cette discipline les derniers temps. C'est vrai que je n'aurais pas du tout eu les mêmes sensations qu'en bassin, que ma technique était sans doute déplorable et les freins nombreux. Décidément, pour une ancienne nageuse, j'en bave vraiment avec la natation en course malgré mes efforts. C'est comme ça, il faut parfois beaucoup de temps pour progresser, et beaucoup de remises en question.

Je repars donc à VTT sans personne devant, j'ai un peu de mal à trouver de bonnes sensations au départ, puis ça revient. Je rattrape en fait assez vite les filles devant moi, plus vite qu'aux championnats d'Europe en fait, ce qui me redonne espoir.
Dans un sentier technique, je rattrape deux filles qui bloquent d'abord un junior devant moi, puis me bloquent avec le même zèle, même le sourire aux lèvres pour l'une d'entre elle. J'hallucine de ce manque de fair-play, dommage que l'on ne puisse pas faire de même en course à pied, j'aurais sans doute pu gagner une place si j'avais le même mauvais état d'esprit que cette concurrente. 

Au fuR et à mesure, messensations deviennent meilleures, je ne fais plus aucune erreur technique ou de pilotage dans le second tour et continue de remonter au classement, pour finalement poser le vélo en 9ème position. Dommage que je n'ai pas pris le temps de travailler un passage technique, qui permettait de gagner environ 5'' par tour, ce que David m'avait indiqué. Il m'aurait en fait été bien utile... Je prends malgré tout le 5ème meilleur temps, ce qui est plutôt bien compte tenu du fait que j'ai eu le sentiment de peu travailler à VTT en Septembre.

Photo OrgaNICOach


C'est parti pour 9kms de course à pied, en partie sur la plage et dans le sable. Déplaisant, mais c'est pour tout le monde pareil ! Mes sensations ne sont pas trop mauvaises, je débranche le cerveau pour ne pas penser qu'il faut faire 3 tours, donc 3 passages sur la plage ! On m'annonce que je ne suis pas loin de Renata Bucher et que je gagne un peu de temps, ce qui renforce la motivation.
Fin du premier tour, je passe vers la "penalty box" et vois mon numéro affiché. Première fois que j'y ai droit, sur un championnat du monde, c'est sympa. Je pense alors que c'est parce que j'ai jeté ma bouteille d'eau depuis l'extérieur de la zone, dans la zone malgré tout. Je me dis que peut-être c'est un mal pour un bien, je repartirais avec un bon geste et cela sera bénéfique.
En effet, mon deuxième tour sera très bon et je reprendrais pas mal de temps.

Photo OrgaNICOach

Au troisième tour, sans m'en rendre compte, la technique doit être moins bonne et je commence à courir un peu moins vite. Ce qui profite à deux concurrentes qui reviennent. Je m'accroche malgré tout, surtout lorsque David m'annonce qu'une des deux a une pénalité, qu'elle va devoir donc s'arrêter 15'' avant la ligne d'arrivée, qu'il faut donc que je réduise l'écart entre nous. Je m'accroche donc pour ces 500 derniers mètres, je commence à respirer vraiment fort et tout mettre en place dans la tête pour donner le maximum, la concurrente s'arrête dans la penalty box, je passe, puis quelque secondes après, je me fais déposer à 10m de la ligne d'arrivée par elle.

Je pense être 10ème donc je me dis que ça n'est pas grave, en fait, je serais 11ème : pas de top 10, pas de prize money...dégoûtée ! Nous arrivons à 4 en 30" et j'ai la plus mauvaise place de ce groupe :)

La leçon du jour (si je ne l'avais pas déjà apprise un jour...) : chaque seconde compte et sur une course de ce niveau, il ne faut rien rater.
Pourquoi j'ai pris 15'' de pénalité : parce que j'ai négligé ma zone de transition et je n'avais pas rangé toutes mes affaires à l'issue du vélo. Gros moment d'absence, que j'aurais évité en visualisant ma transition comme on doit le faire à la fin du vélo.
C'est 15'' qui m'ont fait perdre une place, mais on ne refera pas la course. J'ai surtout perdu trop de temps en natation, mon temps m'a démoralisée après course. Ça n'est pas comme si j'avais fait un an de sport-étude en natation plus jeune et comme si je n'aimais pas ce sport...c'est donc un peu difficile à digérer. La natation en eau-vive et en compétition de triathlon n'a vraiment rien à voir avec le fait de nager en bassin. Et j'ai peut-être trop nagé en piscine cette saison.

Malgré tout, je suis contente car grâce à "coach André", j'aurais été au top de ma forme malgré tous les aléas de Septembre. J'aurais pu avoir cette place dans le top 10 et c'est très satisfaisant pour un championnat du monde en élite. L’événement et le cadre étaient super, un très bon week-end de triathlon. Le lendemain, nous aurons encouragé les "groupes d'âge" sur leur course et l'ambiance était du tonnerre pour la dernière course (celle des dames et des plus de 50 ans). On aura beaucoup ri et crié, notamment grâce aux supporters allemands. La cérémonie de clôture, autour d'un dîner sarde, aura permis de regrouper tout le monde une dernière fois et aura été conclue par un plongeon général dans la piscine de l’hôtel. En même temps, regrouper des triathlètes autour d'une piscine, c'est risqué !

Nous aurons fait quelques nouvelles connaissances, françaises et autre, malgré le fait que nous soyons venus de notre côté. La délégation française n'était malheureusement pas aussi soudée que celle des autres nations que l 'on a pu croiser. Le représentant de la fédération se sera bien occupé des groupes d'âge le dimanche (en donnant des conseils comme le fait qu'il fallait enlever les prolongateurs sur le vélo, ou qu'une moto suivrait les coureurs avec arbitre pour donner des pénalités en cas de drafting (autorisé sur la course)...). Mais les élites le samedi n'auront vus personne. Heureusement que Nicolas Lebrun, en assistance de nombreux coureurs via son team "OrgaNICOach", sera volontairement venu nous apporter son soutien et des encouragements et indications précieuses pendant la course. Nous étions de nombreux français, plusieurs d'entre nous ont fait des podiums dans leur catégorie d'âge ou des places d'honneur en élite. Dommage que nous soyons passés si inaperçus en dehors de la course et des podiums.

Bravo à David, qui a gagné la course Open en faisant un meilleur temps que le mien (grâce à un très bon VTT). Il aura même fait un meilleur temps que moi en natation avec très peu d'entraînement : j'en croirais presque que ça ne sert à rien de s'entraîner... J'ai vraiment dû apprécier d'être dans ces eaux cristalline pour y passer autant de temps, ou j'ai dû trop longtemps suivre une raie au fond que l'eau qui m'aura déviée du bon chemin :)

Nous profitons maintenant de quelques vacances reposantes en Sardaigne avant de terminer la saison au Roc d'Azur (Roc Marathon et Roc Dame pour moi). "Enfin (presque) des vacances à rien faire !" comme diraient certains !


Lever du jour à Cala Fuili, le paradis des grimpeurs, pour la suite de nos périple en "VW-Bus"



dimanche 6 septembre 2015

XL de Gerardmer : encore une leçon !

Après une participation très marquante pour moi en 2013 sur ce triathlon XL de Gerardmer, du fait de la difficulté que j'avais éprouvée en course à pied, j'avais envie de remettre cela cette année. Avec deux années d'expérience en plus, j'espérais terminer cette course dans de meilleures conditions et améliorer mon chrono. Cette course, avec ces 1,9km  de natation, 93km de vélo (pour 1800m de D+) et 21km de course à pied, est sans doute une des plus belles en France, une des plus plébiscitées (difficile d’obtenir sa place quand on s'y prend trop tard... 3 mois avant, c'est déjà trop tard !), mais aussi une des plus dures.
Mais le public, l'ambiance, l'organisation, les paysages des Vosges, tout est là pour donner envie de se surpasser et terminer. C'est pour cela que malgré la difficulté que tout le monde éprouve, on est suffisamment fou pour vouloir remettre ça.

Pour moi, il ne s'agissait pas d'un objectif prioritaire cette saison, l'objectif étant plutôt fin Septembre avec les mondiaux de cross-triathlon. Mais c'était tout de même une étape à ne pas rater.

La motivation commençant à décroître tout doucement cette saison, il commence à devenir plus difficile de m’entraîner seule. L'impression de tourner en rond, malgré une bonne forme. Je fais mes plans d'entraînements parce que cela me plaît d'apprendre par moi-même comment progresser, et parce que je me connais bien. Et aussi parce que j'ai aussi eu de très bons coachs, en cyclisme et en triathlon, qui m'ont appris beaucoup lorsqu'ils se sont occupés de moi.
Malgré tout, je pense qu'à certains moments, on ne peut plus progresser seul, et que si on a la chance d'avoir l'opportunité de rencontrer quelqu'un de compétent, aussi bien sur l'entraînement que sur le mental et le côté humain - car il faut savoir transmettre...et suivant les caractères ou les motivations de l'athlète, il faut être plus ou moins dur ou conciliant - il faut savoir saisir l'occasion.
L'opportunité de retravailler avec André Quet, notre précédent coach dans mon club de triathlon de Belfort, s'est présentée cet été. Nous nous connaissons bien sur le plan de l'entraînement, j'ai pu bénéficier de nombreux conseils du temps où il était dans notre club, ce qui m'avait permis de conclure par le titre de championne de France de cross-triathlon l'an passé, notamment. Il est donc plus facile de reprendre l'entraînement à distance, avec au cas par cas, l'utilisation de la vidéo pour travailler des points techniques, comme en natation.
Cela me redonne donc une bonne motivation pour cette fin de saison. L'entraînement diffère un peu dans ce que j'ai l'habitude de faire, mais avec la même philosophie que j'applique (qualité, travail technique, orientation suivant type de fatigue). Cela me correspond donc parfaitement. Et en natation, je sens les progrès, mes défauts techniques ayant été bien ciblés et immédiatement bien corrigés.

La motivation à l'entraînement redonne aussi confiance pour aborder les courses. J'ai fait un premier test sur le triathlon de Vesoul la semaine précédent le XL de Gerardmer, une course d’entraînement : il ne fallait s'économiser à vélo, faire une bonne natation, avec bonne tactique, gestion et orientation, et une course à pied fractionnée. Le test était plutôt bon, mes sensations étant bien meilleures en natation et la place correcte, ma course à pied étant vraiment bonne malgré le fait de l'avoir fractionnée.

Motivée pour Gerardmer, je sais que le forme devrait être bonne, et que tout tiendra à ma bonne gestion de la course. Je me concentre donc là-dessus, prenant en compte le fait qu'il fera froid, à savoir 20-25° de moins que la semaine précédente. Je prépare mes affaires sérieusement, avec vérification de David : un sans-faute :)
Au départ de la natation, nous voilà 1600 au départ. Cela fait du monde sur la plage. Je vois les bonnets jaunes (pro), comme moi, se rassembler à l'avant dans l'eau, personne ne les replace : il faut y aller et partir avec eux devant, pas de complexe. Cela me permettra de partir dans les bons pieds et ne pas être gênée au départ. Je la joue tactique en essayant de profiter un maximum de la vague d'autres concurrents, tout en vérifiant l'orientation. Pour moi, cela paraît correcte, pas le cas de tous les concurrents vraiment éparpillés...il est grand ce lac ! Comme d'habitude, je me sens mieux sur la fin, sans doute parce que mon échauffement n'est pas assez important. Pas grave, je remonte tout doucement et me sens bien.

A la sortie de l'eau, la tête tourne, plus que d'habitude. J'arrive à la zone de transition un peu groggy, David me parle (euh, crie !) et me dit que je suis 7ème pro, voit que je suis à l'ouest et me dit de me dépêcher, qu'il ne fait pas froid et qu'il ne faut pas trop que je m'habille. Je ne sais pas trop quoi faire mais je lui fait confiance et me dépêche : un maillot, pas de chaussette, pas de manchette...d'autant que le froid n'est jamais un souci pour moi.
Je suis aussi perturbée de voir Alexandra Louison (qui a gagné cette course il y a 2 ans) sortir derrière moi en natation. Même si elle n'est sans doute pas au top, jamais je ne sors devant une pro en natation ! Ça annonce une belle journée...

Au départ du vélo, je sens que mes jambes sont un peu bizarres et picottent un peu, puis brûlent...Ah oui, David m'a tartiné les jambes de crème chauffante contre le froid. Ah ben je n'ai pas froid du tout, là !
Le cardio est bien, je fais fi de ces sensations bizarres et avancent. Je me retrouve avec la première fille en amateur, 7ème pro, et ça roule bien. Malgré le monde autour de nous, nous faisons l'effort de ne pas drafter. Enfin, certaines, plus ou moins... La montée règle ça, et c'est tant mieux.
Premier tour OK, mais je sens que ça n'est pas au top, et il reste deux tours. La montée du Poli, à la sortie de Gerardmer, est mythique : du monde, du bruit, les gens qui s'écartent à notre passage...un air de tour de France. En haut de cette bosse, un autre concurrent me dira "Waouh, c'était quelque chose cette montée !". Eh oui, Gerardmer, c'est aussi ça !

En roulant le long des lacs de Longemer et de Retournemer, les jambes commencent à se durcir un peu et décidément, le plat n'est pas mon truc. Là, un groupe, que dis-je, un "bus" me double, avec une concurrente que je connais, qui me regarde au passage. Le drafting étant interdit, mais toujours toléré visiblement par les commissaires sur cette course, cela m'agace. D'autant que je m'efforce à respecter les règles malgré ce laxisme. Pas grave, la montée suivante, je reviens sur elle petit à petit. Là, j'hésite : si je dis quelque chose, je risque d'être vraiment désagréable. Alors, le silence sera d'or, et je passe...
Cela ne se réchauffe pas, mes pieds sont toujours gelés, les descentes ne sont pas une partie de plaisir. Et cela devient de plus en plus difficile, de moins en moins de force et le cardio qui baisse toujours. Portant, je m'alimente bien depuis le début, je tourne bien les jambes, je ne comprends donc pas ce qui arrive et ne me souviens pas d'avoir eu une telle défaillance. Les concurrents remontent petit à petit, et je pense qu'il reste encore un tour et 21kms de course à pied.

Au 3ème tour, le mot "abandon" vient petit à petit à l'esprit, je ne vois pas comment je retrouverais la force de pouvoir courir après cela, j'ai déjà tellement du mal à finir ce vélo, mes jambes sont deux poteaux. Alors je pense à pourquoi je suis venue, la chance que j'ai de pouvoir faire cela, à la difficulté d'un abandon, les jours après course...je ne l'ai pas souvent fait, ne me souviens même plus de mon dernier abandon, mais l'amertume des regrets, je m'en souviens. J'encourage les filles que je rattrape, la plupart sourient et disent "merci, bravo !". Je me dis : "tu roules deux fois plus vite et tu penses à abandonner...c'est n'importe quoi !"

Alors arrivée à la zone de transition, je me dis qu'il faut voir comment je me sens en course à pied, essayer et décider. J'enfile mes baskets sans grande conviction, j'en oublie de mettre mes chaussettes (décidément !), et je cherche David. On retrouve la foule au bord du lac, les gens nous encouragent si sympathiquement qu'on se dit que cela va redonner du baume au coeur. J'apperçois enfin David, j'ai pu courir un peu et sentir que bizarrement, c'est comme si je n'avais rien fait avant...c'est vrai que depuis 1h30, je roule "pépère" même si c'était difficile. On discute un peu, je lui explique ma défaillance, que là ça va et repars.

Passage sur le lac en course à pied

Je cours et tout va bien. Les concurrents qui m'avaient doublé en m'encourageant à vélo sont surpris de me voir les doubler, mais tout va bien. Je sais que je n'ai plus suffisamment bu et mangé cette dernière heure, je m'arrête donc aux ravitos et repars. Premier tour, tout est toujours bon.
Si je repars pour un 2ème, ça veut dire que je termine... et je n'ai aucune excuse pour m'arrêter, alors on repart ! Je remonte toujours petit à petit, fait mes petites pauses ravito, ma foulée est bonne, tout est automatique et facile. Cela me redonne le sourire, car ce sont des sensations que je ne connais que depuis cette saison, et que j'ai pour la première fois sur un longue distance. 21kms, cela me paraissait quelque chose d'énorme il y a deux ans, maintenant, c'est comme si je faisais un 10km de l'époque. Je suis vraiment très satisfaite de constater ces progrès.
A l'entame du troisième tour, David m'encourage en me disant que j'ai vraiment un très bon rythme et une bonne foulée. C'est reparti donc, toujours bien, toujours avec des petites pauses ravito coca-eau, pas de mal au ventre, juste quelques douleurs à une hanche et à un mollet sur la fin, qui me rappellent qu'il faut que je fasse attention à ma gestuelle qui peut-être se dégrade. Et bizarrement, aucune ampoule et douleur au pied malgré le fait de ne pas porter de chaussette et de ne pas avoir préparé mes pieds auparavant avec un peu de crème.


La zone d'arrivée : passage des coureurs, écrans géants, live sur internet...tout pour suivre !

Vraiment contente d'être arrivée, d'avoir pu constater qu'en triathlon, il suffit aussi parfois de "changer de paradigme" pour que tout revienne et aille pour le mieux.
Tout cela m'a rappelé aussi tout le travail et le chemin à parcourir pour arriver à exceller sur de telles courses. Malgré ma préparation et mon expérience, je pense qu'il m'en manque encore un peu pour être au top, sinon, je n'aurais pas fait d'erreur au niveau de mon équipement à vélo pour m'assurer contre le froid. Les erreurs restent le meilleur moyen d'apprendre.

Je termine en 5h48, 14ème dame, à peine moins bien qu'il y a deux ans, mais avec une bien meilleure natation (1'30 de mieux), une meilleure course à pied (de meilleures sensations et 5' de mieux malgré les pauses), mais un moins bon vélo (10 minutes de plus).



Bravo à tous les finishers de cette course difficile, en particulier ceux qui n'ont pas toujours les moyens de la préparer comme moi, qui n'ai pas de famille à gérer et qui ai un travail qui me permet d'avoir de bonnes conditions pour m'entraîner, même en travaillant à 100%. Respect, car il faut avoir un sacré mental aussi lorsqu'on ne se sait pas au top pour aller jusqu'au bout.
Merci à tous les bénévoles et l'organisation de ce bel événement, celui qu'il ne faut pas rater (il ne faut déjà pas rater l'inscription !).

Récupération et derniers réglages avant le départ pour la Sardaigne dans 2 semaines et demie, avec les mondiaux de cross-triathlon pour terminer la saison de triathlon. S'en suivra le Roc d'Azur, avec le Roc Marathon et le Roc Dame, pour finir avec du VTT.

Plus de photos à venir...